
Un compte individuel
Chaque salarié ayant des conditions de travail éprouvantes disposera donc bientôt d’un « compte pénibilité ». Concrètement, le travailleur exposé à certains facteurs de risques professionnels (port de charges lourdes, environnement bruyant, exposition à des agents chimiques dangereux…) cumulera des points qu’il pourra ensuite échanger contre une formation, un temps partiel ou un départ anticipé à la retraite. Le principe étant que ce salarié soit « compensé » pour la pénibilité de son travail.Une compensation de la pénibilité
Pour obtenir des points, le salarié doit être exposé à un ou plusieurs facteurs de risques au-delà de seuils déterminés par décret. Afin de laisser aux entreprises le temps de se familiariser avec ce nouveau dispositif, seuls quatre des dix facteurs répertoriés par le Code du travail seront appliqués en 2015 (travail en milieu hyperbare, travail de nuit, travail en équipes successives alternantes et travail répétitif). Les six autres facteurs n’entreront, en effet, en vigueur qu’à partir de 2016. Un report partiel malgré tout insuffisant pour les entreprises, selon Sandrine Chatard, avocate associée au cabinet Barthélémy Avocats, pour qui « le délai entre l’adoption des décrets d’application et l’entrée en vigueur du compte pénibilité reste trop court pour de nombreuses entreprises qui ne seront pas prêtes ». Par ailleurs, pour que ses salariés puissent cumuler des points, l’employeur devra évaluer, le cas échéant, par des mesures techniques, s’ils ont été exposés, au-delà des seuils réglementaires, à ces facteurs de risques. Une tâche qui sera ardue, remarque Sandrine Chatard, principalement pour « les petites entreprises qui n’ont pas toutes les ressources nécessaires pour effectuer les mesures techniques précises que le compte pénibilité impose et qui devront s’orienter vers l’extérieur, soit auprès d’organismes privés avec un coût supplémentaire, soit auprès des services de santé au travail, des Carsat ou des Aract ». Quant au nombre de points acquis, il dépendra du degré d’exposition du salarié à la pénibilité. Par exemple, un travailleur employé toute l’année obtiendra quatre points en cas d’exposition à un facteur de risques? et huit s’il est exposé à plusieurs. Ces points lui permettant ensuite de financer une réorientation vers un emploi non exposé ou moins exposé à des facteurs de risques, un passage à un travail à temps partiel ou, à partir de 55 ans, une majoration des trimestres d’assurance-vieillesse pour partir plus tôt à la retraite.Un compte financé par les employeurs
A compter du 1er ?janvier 2015, les employeurs qui exposent effectivement leurs salariés à la pénibilité devront verser une cotisation. Son taux étant de 0,1 % sur les rémunérations des salariés exposés à un seul facteur de risques et de 0,2 % sur celles des salariés exposés à plusieurs. « Ce compte fait peser des obligations très contraignantes sur les entreprises, surtout pour les petites qui auront des difficultés à trouver le temps et l’argent nécessaires à son bon fonctionnement dans un contexte économique difficile », conclut Sandrine Chatard. Un rapport de Michel de Virville est attendu à l’été 2015 pour faire le point sur l’application de ce dispositif très controversé et apporter, éventuellement, les adaptations nécessaires.
Article inspiré du journal lesEchos.